📆 8 JUILLET 2024. Ce jour-là, le Conseil d’État rend un arrêt qui fera date en droit fiscal… et dans l’univers des locations touristiques. Explications.

Tout commence par une question anodine au moment de réserver ses vacances : hôtel ou Airbnb ? Derrière ce choix en apparence banal, se cache un véritable enjeu juridique, sur fond de concurrence hôtelière et pénurie de logements en location longue durée.

Retour en arrière. Fin 2023, en plein examen du projet de loi de finances pour 2024, le Parlement retient 358 amendements sur les milliers déposés. Au cœur de cette jungle législative, le régime fiscal avantageux des locations meublées touristiques – autrement dit nos chers Airbnb – subit un sérieux coup de rabot. Le seuil maximal de chiffre d’affaires passe de 77 700 € à 15 000 €, et l’abattement forfaitaire fond de 50 % à 30 %.

L’enjeu pour les propriétaires concernés ? Une bascule de leurs revenus dans le régime réel d’imposition qui emporte d’autres modalités avec notamment des obligations comptables significatives. 

L’administration fiscale tente alors de calmer le jeu en publiant une “tolérance administrative” permettant aux propriétaires d’appliquer, pour la déclaration de leurs revenus 2023, le régime fiscal précédemment en vigueur.

Mais la riposte ne tarde pas : hôteliers, professionnels du tourisme, associations, ainsi que parlementaires montent au créneau. Ils déposent un recours en excès de pouvoir devant le Conseil d’État.

Quand la tolérance fiscale prend la porte

Avec cette saisine, le constat des requérants est le suivant : on ne peut pas, d’un côté, vouloir réguler l’essor des meublés touristiques dans certaines villes, et de l’autre, continuer à les encourager fiscalement.

Dans son arrêt du 8 juillet 2024 (n° 492382), le Conseil d’État tranche. La tolérance administrative est annulée, jugée illégale car l’administration a « incompétemment ajouté à la loi ». Toutefois, pas de rétroactivité pour ne pas pénaliser les propriétaires ayant déjà déclaré leurs revenus en 2024 selon l’ancien régime.

Voilà qui fait date.

Cette décision rend donc plein effet au nouveau régime fiscal des revenus de locations meublées touristiques issue de la modification de l’article 50-0 du Code général des impôts par la loi Le Meur , publiée en novembre 2024... Mais la loi agit aussi sur d’autres fronts. L’année 2025 marque ainsi l’extension des pouvoirs accordés aux communes mais aussi aux copropriétés pour réguler ces locations touristiques :

  • Le seuil maximal de location des résidences principales à des touristes peut être limité à 90 jours par an, contre 120 précédemment, limitation adoptée par la ville de Paris dès janvier 2025.
  • Des zones réservées aux constructions à usage de résidence principale pourront être définies dans le plan local d’urbanisme (PLU).
  • Des amendes, allant jusqu’à 20 000 €, pourront être appliquées en cas de non-respect des conditions d’enregistrement du bien loué.
  • Les copropriétés pourront interdire ces locations par une simple majorité des deux tiers, abandonnant l’exigence précédente d’unanimité.

Nul doute que l’application de ces dispositions sera l’occasion de bien d’autres débats judiciaires à l’avenir et ce, d’autant plus que toutes les dispositions de la loi Le Meur ne sont pas encore applicables — à commencer par celles rendant le diagnostic de performance énergétique applicable aux meublés touristiques…

  • publié le 28 juillet 2025